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UNE MANIÈRE DE VIVRE.


La philosophie enseignée au lycée et à l’université consiste généralement à étudier des auteurs et à apprendre l’exercice de la dissertation en se nourrissant de ces références. On ne demande pas aux lycéens ou aux étudiants qui étudient Epicure de s’interroger sur leurs désirs naturels ou leurs désirs vains. Par exemple, lorsqu’ils produisent des Selfies, on pourrait s’interroger : cela répond-il à un désir naturel et non nécessaire ou à un désir vain ? Mais rien de tout cela, la philosophie étudiée en classe ou à l’université reste souvent « hors sol », comme si l’unique but de cette discipline était de réussir sa dissertation au baccalauréat ou à l’agrégation.

Pour les philosophes de l’antiquité ce n’était évidemment pas le cas. On n’imagine mal Socrate, Diogène, Epictète ou Epicure, s’ils revenaient parmi nous, passer leur bac, un concours de l’enseignement ou encore se lancer dans la rédaction d’une thèse de doctorat ! Comme l’a montré Pierre Hadot, la philosophie à l’origine était bien autre chose qu’un édifice théorique, c’était une manière de vivre. Cette manière de vivre passait par des exercices spirituels pratiqués quotidiennement. Par exemple se préparer mentalement aux difficultés de la vie en y pensant chaque matin pour les stoïciens, limiter la satisfaction de ses désirs pour les épicuriens afin de ne pas en devenir l’esclave. Il ne s’agissait pas de produire des dissertations ou de construire des édifices conceptuels mais de vivre d’une manière donnant un peu plus d’emprise sur soi et d’ouverture au monde et aux autres.

La pratique philosophique opère un retour à ces origines. Elle est plus orale qu’écrite et elle conduit à s’interroger autant sur le monde que sur soi. Philosophie orale, elle ne consiste pas à dire ce qui est déjà écrit et pensé mais à penser en acte, à penser ici et maintenant en saisissant ce qui se présente. Lors d’un atelier de pratique philosophique, la réflexion s’élabore collectivement, l’impression est parfois pénible et laborieuse, parfois stimulante et vivifiante. Peu importe, il s’agit de se réconcilier avec "l’intranquillité" de penser, d’éprouver cet étrange et délicat plaisir.

Dans un atelier, la parole est un acte qui nous conduit à nous questionner, à nous transformer par le dialogue, à produire une meilleure conscience de nous-même et des autres. C’est l’occasion de se décentrer, de sortir d’une perspective partielle et partiale, de prendre du recul grâce à la mise en œuvre collective de la raison et de vivre un peu plus grand que soi.

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