COMMENT LES GARÇONS SONT PIÉGÉS PAR LEURS PRIVILÈGES. Voyage Philomobile Maroc jour 30.
Ateliers Philo à El Jadida ou comment les privilèges accordés aux garçons ne facilitent pas leur réflexion et leur rapport à la sexualité.
Le mercredi 15 novembre Dominique et moi-même avons animé un atelier de pratique philosophique avec des élèves d’un lycée de la ville d’El Jadida. Comme nous l’avons fait souvent pendant le voyage, nous avons demandé aux jeunes de choisir le thème sur lequel ils souhaitaient que nous réfléchissions. Ce jour-là le thème et la question ont vite été choisis : le sexisme est-il une question de religion ? Rapidement la réflexion s’est orientée sur l’idée que c’était avant tout un problème de société et d’éducation. Puis il s’est passé quelque chose d’amusant. À chaque fois qu’une hypothèse est proposée dans un atelier, je demande qui est d’accord et qui n’est pas d’accord, invitant ainsi chacun à se positionner et à se mettre dans une attitude de réflexion active. Mais ce jour-là je demande au jeune homme qui vient de parler s’il aime qu’on ne soit pas d’accord avec lui. Il répond par la négative. Je demande alors au groupe « qui aime qu’on soit d’accord avec lui et qui n’aime pas ça », nous constatons alors que tous les garçons du groupe affirment qu’ils n’aiment pas ça tandis que les filles affirment qu’elles aiment qu’on ne soit pas d’accord avec elles. S’en suit alors une discussion sur l’intérêt des désaccords pour la réflexion et le développement de l’intelligence. Nous constatons que les garçons habitués à être considérés comme des maîtres dans les familles et dans la société en général, ont plus de difficultés à se remettre en question et donc à réfléchir. Pourtant ils ne sont pas idiots précise une jeune fille, car l’intelligence n’a pas de sexe, ce sont les conditions qui nous sont faites qui vont stimuler ou pas notre intelligence et notre capacité d'autocritique. Dominique Poulin anime la deuxième partie du dialogue qui porte sur la question du voile et du désir sexuel. Une jeune fille affirme que la nature de la femme est d’être discrète, elle doit donc éviter d’attirer les regards en portant le voile. Mais une autre remarque que même voilées, des femmes subissent le harcèlement sexuel. Donc le problème vient des hommes qui ne parviennent pas à contrôler leurs pulsions. C’est là encore un problème d’éducation d’après les jeunes qui participent à l’atelier. Les garçons imaginent trop souvent qu’ils sont supérieurs et ils ne respectent pas les femmes qu’ils considèrent comme des objets sexuels. Comment faire pour remédier à ce problème ? Demande alors Dominique. Il faudrait des lois strictes qui punissent les débordements et le harcèlement sexuel, propose un jeune homme. Il faut aussi et surtout faire un travail de prise de conscience propose une jeune fille, comme ce que nous faisons pendant cet atelier de pratique philosophique. Finalement cet atelier nous aura fait réfléchir sur des problèmes liés à la société marocaine mais ce sont des problèmes qui ont aussi une dimension universelle. Comprendre ce qui nous limite paraît à la fois indispensable pour penser et pour développer sa sexualité. Si je me crois tout puissant et ne saisis pas le désaccord de l’autre, je reste enfermé dans mon point de vue. Pareil pour le sexe, si je ne respecte pas l’autre et ne comprends pas qui il est, comment il est, je ne suis en lien qu’avec moi-même et alors on ne peut pas parler de rapport sexuel. Mais alors comment faire pour comprendre ce qui nous limite ? Et qui va nous le faire saisir ? L'éducation, la loi, Dieu, l'autre, le questionnement, la Raison, autre chose ?
Merci à Choukri pour la vidéo.