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VAUT-IL MIEUX DIRE LES CHOSES FRANCHEMENT OU SE TAIRE ?

Atelier philo à la Tisanerie de Pontarlier

Tandis que Zacharia et Patricia échangent de façon informelle en attendant les tisanes, Nizar me raconte qu’il est venu ce matin car souvent il s’ennuie lors des repas de famille et même entre amis, il trouve qu’on y passe du coq à l’âne, qu’on parle de choses superficielles pour ne déranger personne. Lui, il a envie de dire qu’il trouve cela ennuyeux, qu’il aimerait aborder des sujets plus profonds, mais il n’ose pas le faire car cela lui a déjà causé des ennuis. Comme Zacharia le lui a dit, en atelier philo on va plus en profondeur et c’est la raison pour laquelle il vient ce matin. Nous tenons donc la question de notre atelier du jour : vaut-il mieux dire les choses franchement ou se taire ? Voici les idées principales que nous avons abordées ce jour-là et que Zacharia m’a aidée à reprendre, car après l’atelier, il m’a envoyé un SMS avec ce qu’il avait retenu de notre discussion.

Le problème quand on n’est pas franc c’est que cela risque de mener à des difficultés ultérieures, même si dans l’instant on en tire avantage. Par exemple, si je ne dis pas à mon voisin qui vient me parler longuement que son bavardage me fatigue, je risque de rentrer une colère en moi qui pourra ressortir à un autre moment et sur une autre personne, car la colère est une énergie emmagasinée qui doit être dépensée, elle peut ressortir à tout moment ou nous épuiser psychiquement car nous dépensons beaucoup de force à la contenir. Et puis si je ne lui dis pas qu’il parle trop, qui le fera ? Mon voisin n’a aucune raison de comprendre le problème par lui-même et il risque de fatiguer beaucoup de personnes autour de lui. Donc en ne disant rien, la difficulté pour moi qui le supporte et pour lui qui n’en a pas conscience, ne fera que grandir. D’un autre côté dire les choses franchement peut blesser la personne à laquelle nous nous adressons, et dans le pire des cas, l’amener à couper les liens avec nous. Au moins, la franchise règle le problème de façon radicale, elle peut aussi amener la personne à se questionner sur elle-même et à changer.

Généralement nous ne disons pas franchement les choses pour ne pas vexer et aussi par peur d’être rejetés et de nous retrouver seuls. Être franc demande donc du courage. C’est sans doute pourquoi la franchise est une valeur. Au contraire, se taire face à une situation qui pose problème est un signe de faiblesse.

Au passage, nous avons souligné que la franchise est particulièrement difficile en famille car c’est là que nous risquons particulièrement gros. Les liens familiaux semblent sacrés, être franc c’est les mettre en péril, ce que l’on ne s’aventure généralement pas à faire. D’où peut-être une explication des inextricables problèmes qui abîment souvent les relations familiales. À creuser.


Puis nous avons distingué la franchise de la volonté de contrôler et de dominer. La plupart des humains ont peur d’être francs, mais certains, plus rares, au contraire n’hésitent pas à dire ce qu’ils pensent. Ce faisant, ils exercent sur les autres une autorité et parfois, ils suscitent même la crainte. Leur posture affirmée peut intimider surtout s’ils se trouvent dans un rapport de domination (professeur, parent, patron, chef). Dans ce genre de situation, le courage de la franchise est beaucoup moins coûteux. S’ils s’adressent à un subalterne en situation de dépendance, ils ne risquent pas d’être mis à leur tour en question. La franchise est évidemment plus difficile dans l’autre sens, quand c’est le subalterne qui s’adresse à son supérieur, il risque bien plus gros.


Alors, mieux vaut prendre le temps de se questionner, quand nous entreprenons d’être francs, sommes-nous en train de chercher à exercer un pouvoir pour nous rassurer, ou cherchons-nous d’abord à nous mettre au service d’une vérité ? Est-ce que cette vérité vaut le coup d'être dite ? Qu’est-ce qui nous guide dans ce cas, est-ce le désir des relations vraies ou bien celui d’humilier et de dominer ? Dans ce dernier cas, il vaut mieux se taire.

Nous avons ensuite examiné le point de vue de celui ou de celle qui reçoit les paroles d’une personne franche. Bien souvent, les humains que nous sommes avons tendance à être trop susceptibles. Patricia a reconnu qu’elle se vexe lorsqu'une personne de son entourage lui dit qu’elle ne met pas son clignotant quand elle conduit et qu’elle devrait le faire. Certes, cette personne ne dit pas cela avec beaucoup de tac, mais il serait tellement simple pour Patricia de reconnaître ce fait plutôt que de se fatiguer à se justifier et à nourrir une colère intérieure contre cette personne qui lui fait souvent des critiques. Et puis si elle le reconnaissait avec un peu plus d’humilité, il est très probable que la personne en question cesserait ses reproches.

Laisser de côté notre amour propre et notre angoisse de perdre la face, nous permettrait peut-être de dépenser moins d’énergie inutile.



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