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PHILOSOPHIE ON THE ROAD. UN PÉRIPLE JUSQU'EN BELGIQUE.

L'EXISTANT À DIVERS POINTS DE VUE


COSMIQUE

Il est possible de considérer l’existant à divers points de vue. On peut l’envisager d’un point de vue large et cosmique. De ce point de vue qui a sa beauté, les humains que nous sommes et la terre que nous habitons, ne sont que poussière dans l’infini étoilé.

Comme la vie un jour s’est formée sur terre, un jour elle disparaîtra. Le soleil ayant consommé tout son hydrogène, s’éteindra. Cette extinction sera précédée par une forte luminosité et des températures insoutenables. Les réserves d’oxygène indispensables à la vie disparaÎtront. La terre passera de la fournaise à l’état de froidure puis la nuit enveloppera la création.


GÉOPOLITIQUE

On peut aussi regarder les choses à un niveau géopolitique. Il est alors question d’États ou de nations qui parfois s’allient mais aussi souvent s’entrechoquent et détruisent dans des guerres et au moyen d’armes de plus en plus meurtrières, les humains qui les composent. Ces logiques destructrices au service desquelles la technique ne cesse d’être perfectionnée, semblent parfois anticiper la fin de l’humanité dans une sorte de volonté de contrôle désespérée. Puisque nous ne pouvons faire face à l’angoisse de la finitude, puisque nous ne pouvons empêcher la fin de toute chose, alors précipitons-là, propose cette vision à la fois prédatrice et nihiliste.


Les citoyens lambda ne semblent pas pouvoir faire grand chose pour éviter une telle précipitation. Comment convaincre aujourd’hui les gouvernants de ce monde de ne pas accélérer les choses ? Comment freiner les effets délétères du contrôle facial, de l’intelligence artificielle et autres fakes-news ?


CE QUI DÉPEND DE NOUS ET CE QUI N'EN DÉPEND PAS

Il y a ce qui dépend de nous et ce qui n’en dépend pas disaient les stoïciens et il est inutile de s’évertuer à vouloir agir sur ce qui ne dépend pas de nous. Belle distinction, mais il n’est pas toujours facile de faire la part des choses et de tracer la limite. L’hubris ou démesure humaine nous pousse à vouloir contrôler au-delà de nos moyens. Et à vouloir contrôler ce que nous ne pouvons pas contrôler nous aboutissons à l’absurdité de tout détruire.



HUMAIN

Mais on peut observer d’un point de vue encore différent, les relations des humains à l’intérieur de groupes, peuples, ethnies, familles, réunis par des cultures distinctes, mais aussi par des expériences sensibles et intelligibles qui relèvent de la condition humaine. Êtres humains capables aussi d’entrer en dialogue grâce à la raison que nous possédons en commun.

À ce niveau-là, les échanges ne sont pas toujours faciles, mais nous ne sommes pas totalement impuissants à agir, ne serait-ce qu’en faisant tomber les barrières faites d'a priori et de préjugés qui nous séparent les uns des autres et rendent le dialogue impossible.

C’est à ce niveau que nous nous sommes placées au cours de ce voyage, entamant à l’instar de Socrate des réflexions avec les personnes que nous avons rencontrées sur notre chemin. Nous avons pu observer qu’il est possible de mener des dialogues exigeants avec des inconnus. C’est précisément parce que ces dialogues sont exigeants que les personnes rencontrées ont accepté de prendre le temps de s’arrêter. Peut-être acceptons-nous parfois de nous ennuyer dans des échanges insipides et sans queue ni tête en famille ou entre amis parce que nous voulons avant tout préserver le lien, mais il n’en est rien avec des inconnus. Il n’y a aucune raison à enfiler les platitudes avec eux. Alors, soit le dialogue s’établit sur une certaine exigence soit, il n’a pas lieu.



Avec une amie Corinne, nous avons donc parcouru les routes de l’Est de la France, jusqu’en Belgique (où j’étais invitée par l’association Pôle Philo pour participer à une journée de formation). Lors de ces 7 journées nous avons rencontré plus d’une centaine de personnes, nous nous sommes questionnées toutes les deux sur les échanges, poursuivant les réflexions, échangeant nos analyses et nous questionnant mutuellement.

Ci-dessous le compte rendu de ces journées, n’hésitez pas à les commenter.




JOUR 1. LUXEUIL-LES-BAINS

Début du périple philo avec Corinne, nous traçons la route, direction la Belgique. Après une nuit passée au bord d'une rivière tumultueuse, nous arrivons sur la place de la mairie de Luxeuil-les-Bains, petite ville thermale au pied des Vosges. Ce lundi, la plupart des commerces sont fermés, pas grand monde dans les rues. Malgré cela, nous installons notre pancarte, un tabouret et deux chaises, avec l’intention d'inviter les passants à s'arrêter un moment pour prendre le temps de dialoguer. Mais la plupart des gens sont pressés et esquissent un sourire poli en prétextant ne pas avoir de temps.


RENCONTRE AVEC MEHDI

Mais voici qu’un jeune homme gare sa voiture à côté de la pancarte. Nous l’interpellons, il nous dit, lui aussi, qu’il n’a pas le temps, il doit faire ses courses. Je rétorque que nous ne passons pas souvent à Luxeuil-les-bains et que ses courses, elles, ne vont pas bouger du magasin. Il pourrait rater l’occasion de discuter avec nous. Il sourit et arrête son moteur. Je lui demande s’il aime les surprises, il répond qu’il n’aime pas trop ça. Je lui suggère que s’il n’aime pas les surprises, c’est peut-être qu’il aime contrôler. Ce n’est pas faux dit-il ses amis lui font remarquer parfois ce trait de caractère. Il a tendance à contrôler même la place des objets dans la colocation.

Alors nous questionnons, pourquoi peut-on se mettre à accorder autant d’importance à des choses insignifiantes au point de devenir maniaque. Peut-être contrôlons-nous ces détails insignifiants parce qu’en nous focalisant sur eux nous ne pensons pas à des choses plus inquiétantes ? S’attacher à des détails est-ce une façon de fuir la réalité en ne la regardant pas dans sa globalité ? Une peur d’affronter les vrais problèmes ? Un prétexte pour ne pas s'engager dans des choix plus importants mais difficiles à assumer ?

Nous discutons un moment puis nous constatons que finalement Mehdi n’est pas si contrôlant que cela. Il a tout de même fait preuve de curiosité et de confiance pour dialoguer avec des inconnues. Sinon, il aurait pris la fuite comme bien d’autres et il n’aurait pas trouvé le temps de se questionner avec nous comme il l’a fait.


RENCONTRE AVEC LÉO ET CHRISTINE

Puis arrive un autre jeune, Léo, casquette vissée sur le crâne et petit sac en bandoulière, son smartphone semble vissé à la paume de sa main. Il ne sait pas ce qu’est la philo. Il n’a pas son bac. Il me questionne sur cette discipline. Je lui dis qu’en autres, elle donne un certain recul sur soi. En effet c’est important dit-il, car sans distance avec soi-même comment pourrait-on progresser ?

Une femme, la cinquantaine, passe devant nous. Je l’interpelle. Elle dit qu’elle n’a pas le temps, elle est venue s’imprégner de la beauté de l’architecture. Je souligne : « vous préférez donc la beauté de l’architecture à la discussion entre humains ». Je sais bien qu’en faisant cette observation, elle se sentira probablement provoquée. Ça ne rate pas. Piquée au vif, elle reste finalement dialoguer avec nous pendant une bonne demie heure.

Nous poursuivons sur l’importance de prendre du recul avec soi. Je fais remarquer à Léo qu’il ne s’intéresse peut-être pas beaucoup à nous car son smartphone semble quand même plus attractif puisque lorsque nous parlons il ne peut pas s’empêcher de le regarder. À ces mots, il le glisse dans sa poche et remarque « entre jeunes parfois nous sommes réunis mais chacun regarde son smartphone et nous ne parlons presque pas, c’est dommage ». Mais ce lundi-là justement Léo, la vingtaine et nous trois beaucoup plus âgées, nous prenons le temps de dialoguer. Christine semble même avoir oublié qu'elle était venue pour contempler les monuments.

C’est joyeux de se rendre compte, que tandis qu’a priori tout nous sépare, nous pouvons prendre le temps de réfléchir ensemble. Nous réalisons et nous expérimentons que nous avons aussi la raison en commun. Avant de nous séparer, Léo nous montre son compte Instagram, il compose de la musique et écrit des textes de Rap.

Cependant, notre halte sur la place de Luxeuil prend fin lorsque nous sommes priés par une représentante de la mairie de quitter les lieux, nous n’avons pas l'autorisation requise pour occuper l'espace public. Nous plions donc bagage, prêtes à poursuivre notre périple ailleurs.





PHILOSOPHIE ON THE ROAD. JOUR 2.

Nous sommes arrivées à Pont-à-Mousson , petite ville de Meurthe-et-Moselle. Nous y retrouvons Aline qui se forme à la pratique philosophique depuis deux ans et anime elle aussi des ateliers philo. Corinne, elle et moi, nous nous installons le long de la majestueuse et paisible rivière avec notre pancarte. Certains passants, la voyant, font un détour pour nous éviter. Il est vrai qu’il existe en France une certaine méfiance, à l’égard des démarcheurs et autres adeptes de sectes. Nous interpellons celles et ceux qui passent tout de même devant nous. « Je n’ai pas le temps » c’est souvent l’excuse pour éviter de s’arrêter.


JAMEL ET LE SENS DE L’EXISTENCE

Mais Jamel un homme d’une trentaine d’années, d’abord un peu surpris par notre démarche prend le temps de se questionner avec nous sur le sens de l’existence. Pourquoi sommes-nous là ? Est-ce qu’un Dieu a voulu notre existence ou est-ce simplement le hasard ? Auparavant, Jamel dit qu'il était athée, mais maintenant il croit en une entité supérieure, même s’il n’est adepte d’aucune religion. Sa croyance le soulage de l'angoisse du néant. Corinne, elle a fait le chemin inverse, elle pense aujourd’hui que la vie est absurde, qu’elle n’a pas de sens et que c’est donc à chacun de lui en trouver un. Nous poursuivons le questionnement.

Croire en un Dieu, cela conduit-il à déprécier la vie ici-bas ? Comme si ce qui nous a été donné de vivre lors de notre passage sur terre ne suffisait pas et qu’il fallait autre chose pour donner du sens et trouver satisfaction. La croyance est-elle comme le pensait Nietzsche le signe d’une forme de nihilisme ?

Mais si l’on ne croit en rien d’autre que cette vie-là, quelles sont les conséquences ? Cela peut conduire à vouloir profiter au maximum puisqu’on pense qu’il n’y a rien d’autre. Mais dans ce cas, cela n'entraîne-t-il pas un rapport consumériste à l’existence ?

Avec Jamel, nous avons posé le problème, mais nous n’avons pas la réponse définitive. Il reste au lecteur de cet article de blog de poursuivre la réflexion.


IDRIS, INÈS, AUGUSTIN ET AHMED, LES DÉFIS ET L'ÉCOLE

Sur le chemin du retour de l’école, voici 4 enfants. La maman qui les accompagne est ravie de cette opportunité pour eux de réfléchir avec nous. Je leur demande s’ils aiment l’école. La réponse est plutôt oui. C’est important l’école car cela permettra de trouver un travail dit Idris,12 ans. Inès, 10 ans, aime l’école pour retrouver ses copines.

Mais n’y a-t-il pas autre chose que le futur travail et les copines qui pourrait faire aimer l’école ? Inès dit qu’elle aime aussi les divisions. Elle aime les chiffres, compter, mesurer, elle aime les problèmes car c’est un défi de les résoudre. Elle est vive, intelligente.

Augustin est plus en retrait. Je fais remarquer à Inès qu’elle ne le laisse pas parler, alors elle se sauve vers sa maman. Augustin parle maintenant, mais Inès ne l’écoute pas. Lui aussi, il aime bien les maths. Parfois, il stresse quand il ne comprend pas et qu’il faut finir rapidement un devoir, alors il respire ou regarde par la fenêtre pour retrouver son calme.





PHILOSOPHIE ON THE ROAD. JOUR 3. Moselle.


CRÉATIVITÉ

Aujourd’hui vers 16h nous nous arrêtons dans un endroit de promenade près d’un plan d’eau aménagé. Il fait doux, un air de printemps flotte dans l’air. Quand je questionne une petite fille de 6 ou 7 ans sur ce qui nous rend heureux, elle nous dit qu’être heureuse pour elle, c’est dessiner et peindre. Une passante arrive par là, je l’interpelle aussitôt : si vous partagez l’idée de cette petite fille que la création rend heureux, sauriez-vous nous dire pourquoi ? La passante se prête au jeu et commence à réfléchir, la création nous rend heureux parce que nous pouvons exprimer notre intériorité, dit-elle. D’accord mais qu’est-ce que cela veut dire et comment expliquer cela à une enfant de 6 ou 7 ans ? La passante ne sait pas trop comment faire, tant pis, nous restons avec la question : pourquoi la création peut-elle rendre heureux ?



DES DIALOGUES EXIGEANTS

Deux jeunes filles arrivent sur le chemin, je les interpelle, puis c’est au tour d’une femme plus âgée avec son mari. Une autre femme nous rejoint. Nous formons un petit groupe dont les individus ne se connaissaient pas il y a trente seconde. Ce groupe est instable encore, on sent bien que chacun craint de perdre son temps et est prêt à se sauver. Mais je questionne les uns et les autres et je m’efforce de les mettre en dialogue, de les faire interagir entre eux, de les conduire à s’écouter, à se questionner, à s’intéresser les uns aux autres.

Il s’agit donc de faire tomber les barrières de méfiance et de préjugés qui nous séparent les uns des autres et nous empêchent de nous prêter au simple jeu de la réflexion. Assez rapidement, les personnes se rendent compte que ce n’est pas si compliqué et cette prise de conscience les réjouit. Au bout de quelques minutes, chacun et chacune se met à réfléchir sur des problèmes communs. Je régule la parole pour que la discussion ne se dilue pas, je fais en sorte de maintenir le fil des idées et une qualité d’attention et d’écoute.

C’est amusant d’observer les attitudes, certaines personnes commencent par dire qu’elles n’ont vraiment pas le temps de dialoguer, qu’elles doivent faire leur courses ou s’occuper du chien, avec Corinne et Carole, nous sourions de les voir finalement rester plus de trois quart d’heure à chercher des idées avec les autres.

Au bout d’un moment nous sommes tellement absorbés dans la réflexion que cela donne envie à d’autres passants de nous rejoindre. Ainsi Salvatore, arrive-t-il dans notre groupe. Il aimerait dialoguer lui aussi. Il est le bienvenu. Il nous explique qu’il a fait trois fois le tour du plan d’eau, avant de se décider à demander à intégrer le groupe et finalement il est venu et le voilà qui se met maintenant lui aussi à l’écoute. À la fin de la rencontre il repart content d’avoir participé, il retourne chez lui avec les idées d’autres personnes auxquelles il n’aurait peut-être pas pensé tout seul.





PHILOSOPHIE ON THE ROAD. JOUR 4. Belgique, commune de Tellin en Wallonie.


Ce soir Corinne m’a donné le défi de faire le résumé de la journée en 5 lignes.

Nous arrivons chez Elisa qui nous accueille, elle a réuni un groupe de personnes, milieu plutôt alternatif. Le dialogue n’est pas toujours facile car nous réalisons que souvent nous sommes prisonniers d’une image de nous-mêmes. Nous voulons la défendre, cela empêche l'écoute, la légèreté et la réflexion libre.




PHILOSOPHIE ON THE ROAD. JOUR 5. Belgique. Atelier philo à l'école alternative de la commune de Rochefort.


Ce matin nous avons philosophé avec un groupe d’enfants à L'Ecole des Petits Chemins. Ici les enfants apprennent très tôt à dialoguer ensemble, à s’exprimer, à dire ce qu’ils ressentent et ce qu’ils pensent, à se positionner. Mais ici comme ailleurs, ils éprouvent des difficultés à porter leur attention.


CONTENU DE L'ATELIER, porter son attention et exercer sa liberté.

Nous nous sommes installés dans la yourte dans laquelle les enfants ont classe habituellement.

Tout d'abord en observant la difficulté de certains enfants à se concentrer, je leur ai demandé s’ils voyaient un lien entre la concentration et la liberté, concept qu’il était prévu d’aborder avec eux ce jour-là.

(Philosopher c’est aussi apprendre à conscientiser ce qui se passe, il est donc intéressant de parler de la liberté et d’en faire en même temps l’expérience. D’examiner ce concept non seulement en théorie mais dans ce qui arrive en pratique. Par exemple, être concentré, cela a-t-il un rapport avec la liberté ?)

Les enfants ont montré qu’en effet on est libre quand on se concentre sur quelque chose qu’on souhaite faire et que si on se laisse déconcentrer on perd cette liberté. Par exemple, on est libre quand on réussit à se concentrer sur un exercice de math, un jeu de légo, un jeu vidéo, un dessin. Par conséquent on perd sa liberté quand pour une raison ou pour une autre on ne parvient pas à se concentrer sur ce qu'on fait.

Un enfant a proposé de distinguer les moments où l’on se concentre sur ce qu’on « veut » faire et les moments ou on se concentre sur sur ce qu’on « doit » faire, en soulignant qu’on est libre quand on choisit ce sur quoi on se concentre.

Puis nous nous sommes demandé si l’on peut trouver de la liberté même dans les obligations. Les enfants ont proposé que c’est possible quand nous nous sentons en accord avec cette obligation ou bien quand à l’intérieur d’une obligation nous trouvons un espace de liberté par exemple quand on est obligé de rester à la maison, mais qu’on peut regarder par la fenêtre ou dessiner la forêt.

Les enfants ont également eu l’idée qu’il existe non seulement des barrières physiques à notre liberté, mais aussi des barrières immatérielles. Par exemple quand nous nous enfermons dans nos pensées, quand nous nous mettons à tourner en boucle dans nos obsessions, ou encore quand nous nous laissons dominer par la peur nous ne sommes pas libres. Dans ce cas nous n'osons pas sauter d’un plongeoir ou aller rejoindre un groupe de personnes pour leur demander de nous accepter.


TRAVAIL SUR LES ATTITUDES, PRENDRE CONSCIENCE

Animer un atelier de philosophie c’est aussi, apprendre aux enfants à porter leur attention sur la réflexion en cours (mais les adultes ont également parfois beaucoup de difficulté à être attentifs pendant le dialogue).

Il arrive souvent qu’au début d’un atelier je fasse remarquer à certains enfants qu’ils n’écoutent pas les autres, leur corps est présent mais leur pensée est agitée ou dispersée. Bien souvent, quand un enfant n’a pas compris la question ou la consigne, cela ne relève pas d’un problème cognitif mais d’un problème d’attention.

Alors souvent je m’arrête et nous prenons le temps d’observer cette difficulté ensemble (car parfois nous sommes tellement dispersés et inattentifs que nous n’avons pas conscience de l’être).

Aujourd’hui, c’est ainsi grâce à la prise de conscience que Yolan, Jean, Cassandra sont rentrés dans la discussion. Cela ne semblait pas gagné au départ. L’un deux a commencé par dire qu’il n’avait pas envie de partager ses idées, un autre n’avait pas compris une consigne pourtant simple. Mais ce fut un plaisir pour tous de constater que finalement en prenant conscience, ils ont changé d’attitude et apporté des idées qui ont permis de faire avancer la réflexion.




PHILOSOPHIE ON THE ROAD. JOUR 6, 7 et FIN. Derniers ateliers de cette semaine nomade en Belgique et dans l'Est de la France et retour à la maison.


LE MYTHE DE L’IDENTITÉ

Hier, dernier atelier philo de ce périple à partir de la question choisie par le groupe sur une suggestion de mon hôte Lucie Antoniol: l’identité est-elle un mythe ?

La réponse des participants : l'identité est en effet un mythe, elle n’existe pas véritablement puisque ce qui nous constitue est sans cesse changeant. Quel rapport entre le bébé et l'enfant que nous étions, celui ou celle que nous sommes maintenant et que nous serons demain ?

L’identité est donc une fiction dont nous avons besoin pour diverses raisons.

Nous pouvons en avoir besoin pour revendiquer nos différences. Dans ce cas notre identité nous donne le sentiment d’exister individuellement.

Mais la société peut aussi avoir besoin de fixer des identités, avec comme critères : l’âge, le sexe, la profession. Cela permet de trier les individus en catégories plus ou moins valorisées ou dévalorisées.

Nous pouvons aussi avoir besoin de nous identifier à un groupe car alors nous nous y sentons en sécurité.

Dans une famille, les identités se confondent avec les places et les rôles qui vont avec : la mère, le père, les grands-parents, les enfants, les cousins, etc.

On comprend aussi que ces besoins d’identité s’ils présentent des avantages comportent aussi des inconvénients. Le besoin d’exister (favorisé par les réseaux sociaux) peut devenir autocentré et narcissique. D’un autre côté le fonctionnement social en assignant des identités enferme chacun et chacune dans un rôle qui peut l’étouffer.

La sécurité que procure le sentiment d'appartenance à un groupe peut aussi produire l’affrontement avec d’autres groupes qui n’ont pas la même identité.

Alors faut-il revendiquer notre identité au risque de fabriquer un mythe narcissique ? Faut-il se reconnaitre dans un groupe au risque de tomber dans des logiques identitaires d'affrontement ?

À la fin de l'atelier, les participants ont proposé l'idée qu'on peut jouer avec son identité ou plutôt ses identités, on peut s'amuser à porter des masques. On peut cacher son ou ses identités comme l’artiste Bansky. S’agit-il d’une femme, d’un homme, d’un groupe de personnes ? Nous n’en savons rien. C’est à travers son œuvre peut-être que cette/cet artiste se trouve une identité, mais sans éprouver le besoin de la relier publiquement à sa personne.


DÉFENDRE SON IDENTITÉ OU PHILOSOPHER ?

Finalement au cours de ces nombreux échanges, le thème de l’identité et de l’image que nous voulons défendre a été présent en filigrane tout au long du voyage. Ainsi, il est arrivé que certains hommes refusent de se prêter au jeu de répondre aux questions que je posais lors des ateliers. Pourquoi ? Il est possible qu’ils ont pensé que leur identité masculine était remise en cause par une femme qui les questionnait. Une autre personne n’a pas apprécié lors de la formation à laquelle je participais à Wavre pour l’association Pôle Philo que je lui propose de cesser d’intervenir pendant 10 minutes pour observer ce qui se passait. L’identité qu’elle s’était construite d’une personne active, participant, aidant et éclairant le groupe a probablement été mise à mal par ma proposition.

Mais une autre personne à laquelle j’ai fait la même proposition dans un autre groupe a trouvé l’expérience de ne rien dire pendant quelques minutes plutôt amusante et intéressante.

Quant à moi, il m’est arrivé également de sentir mon identité blessée ou attaquée quand on a remis en cause mon activité. Je me suis mise sur la défensive. Pourquoi donc ? Probablement parce qu'une part de moi a construit son identité et nourrit mon ego à travers mon activité.

Mais se sentir blessé et se mettre sur la défensive n’est pas agréable, alors cela donne à prendre un peu de distance et à réfléchir.

Où plaçons-nous notre identité et pourquoi le faisons-nous ? Mettons-nous notre ego au service de notre action ou nous servons-nous de notre action pour nourrir notre ego ?


FIN DU VOYAGE

Au cours de ce périple durant lequel Corinne fut ma coéquipière, nous avons philosophé avec une centaine de personnes. Nous avons invité chacun et chacune à se questionner, à écouter les idées des autres, à prendre un peu de recul avec soi. Merci aux très chaleureux accueils de Carole, Elisa, Mireille et Lucie et Michiel

Prochaines aventures de la Philomobile à partir du 7 avril avec une nouvelle coéquipière venue de Côte d’Ivoire Daouda Adja Bio Cécile.



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